« Ce n’est que moi.
Et c’est elle ou moi.
elle qui est
Dans son printemps
Celle que personne
N'attend
Et c'est la moche
Ou c'est la belle
Fille de brume
Ou de plein ciel […]
Une sorcière comme les autres. »
J’écris de la main gauche, pas Christa.
C’est un petit détail.
Microscopique.
Je le change sans même m’en rendre compte.
Tous.
De ma main d’écriture, de mon accoutrement, de ma posture, de mon ton, de mon indifférence…
Elle m’habille. Je revêts Christa.
Elle est une peau inconfortable, une chair trop serrée, qui me force à me modifier.
Comment je parle.
Comment je ris.
Comment j’aime.
Je suis l’ombre de Christa.
Et ils croient tous que j’ai un sourire trop facile.
Que j’ai des yeux trop grands, trop purs.
Christa est douceur.
Je suis indifférence.
Christa est le monde sur lequel j’erre.
Un monde duquel j’espère disparaître.
Ils ont tant attendu de Christa.
Ils la voulaient sage.
Ils la voulaient obéissante.
Ils ont créé Christa.
Ils l’ont créée sans même se soucier de moi.
Ils voulaient une sauveuse.
Je ne voulais qu’exister.
Un peu.
Ils m’ont appris à la mépriser.
Je suis la colère de Christa.
Elle veut ce que les autres désirent.
Je ne désire rien.
Christa veut l’univers.
Je ne veux rien.
Elle répare.
J’abîme.
Elle inspire.
J’étouffe.
Elle construit.
Je décime.
Christa la déesse,
Historia sans histoire.
Ils continueront à m’appeler Christa.
Ils me définiront par elle.
Me compareront à elle.
Comme si nous étions une.
Comme si nous étions moi.
Mon mépris s’étendra en haine.
Ils bafoueront ce qui restera de ma fierté.
Elle se fera grande.
Je me ferai minuscule.
Je suis l’orgueil de Christa.